La première sortie de l’année pour l’APPV, celle d’hiver - bien qu’elle ait eu lieu le premier jour du printemps - a eu comme destination la ville de Saint Nazaire dont le développement est lié à celui de son port.
Trois visites regroupant plus de 20 personnes (dans la joie et la bonne humeur), ont été faites durant cette journée.
La plus marquante peut-être, était les chantiers de l’Atlantique, véritable ville dans la ville ; durant 1h30, en car, nous avons déambulé dans un cadre strict. Si le port de Saint Nazaire a vu le départ de nombreux paquebots, au XXème siècle, il a été décidé que son port serait réservé à la construction des paquebots tandis que celui du Havre serait utilisé au transport afin d’éviter une concurrence inutile et dommageable.
Historique
Au milieu du XIX siècle St Nazaire n’était qu'un bourg, l'activité maritime étant centrée sur le pilotage en Loire. Avec l'ouverture de lignes transatlantiques pour l'Amérique le besoin de construction de grands bateaux de ligne, essentiellement produits à l'étranger, est devenu urgent.
Le premier bassin à flot du port, St Nazaire - Penhoët, fut construit entre 1847 et 1856.
La concession de la ligne transatlantique à partir de St Nazaire fera naître la Compagnie Générale Transatlantique (CGT - août 1861). Celle ci ayant obligation de faire construire en France 50% de ses bateaux se tournera vers le chantier écossais de Greenock, faisant appel à un jeune ingénieur, John SCOTT, passé maître dans la construction métallique. Un premier contrat conclu avec les écossais concerne 5 paquebots qui seront construits sur le site des cales de lancement de Penhoët, dont l'Impératrice Eugénie (108 m et 3200 tonneaux).
Le second bassin sera construit entre 1862 et 1881.
Après 10 années de pause la construction navale reprend avec la construction de paquebots, cuirassés, croiseurs de tailles en constante augmentation.
Début XXème une entreprise distincte de la CGT est créée pour la construction navale, la Société des Chantiers et Ateliers de ST Nazaire. Avec une deuxième société, Chantiers et Ateliers de la Loire, les deux chantiers vont construire pendant un peu plus d'un demi siècle 273 bateaux de commerce et 117 unités pour la Marine Nationale. La construction connaît de nombreuses évolutions techniques, motorisation vapeur et diesel, assemblage riveté puis soudé des coques et structures.Pendant la seconde guerre mondiale le port verra la construction de la base sous marine abritant les sous marins allemands et l'écluse fortifiée. Le port et la ville seront dévastés par les bombardements alliés.
Après guerre l'activité s'est progressivement intensifiée, avec des réalisations de renom paquebots France (3), Queen Mary II, navires militaires porte avion Foch, Mistral..
La construction à l'origine réalisée sur cale est transférée dans des bassins vidangeables (forme de radoub).
Aujourd'hui les chantiers livrent 3 paquebots par an et les commandes affluent, principalement pour la croisière.
Récemment l'activité de construction a été étendue aux Énergies Marines Renouvelables (EMR) avec les parcs offshores.
Le développement de la propulsion vélique est également une nouvelle activité, projets Solidsail et Seakite.
Étapes et organisation de la construction de navires
En provenance d'aciéries les tôles > 15mm de 20m sont entreposées sur parc, tandis que les moins épaisses arrivent en bobines déroulées sur site, puis entreposées sur parc. Il faut environ 60000 t d'acier par paquebot. Deux qualités d'acier sont utilisées, standard de couleur grise pour l'essentiel, haute résistance (HR) de couleur rose pour les œuvres vives du navire.
Les tôles sont déplacées dans la zone d'usinage par de nombreux portiques à électro aimants. Les tôles sont ensuite grenaillées, peintes avec un primaire de protection.
Dès le découpage chaque élément est marqué d'un repère qui identifie le navire et l'emplacement de ce dernier. Aujourd'hui des robots avec torche plasma sont majoritairement utilisés.
Les premiers assemblages sont réalisés en ateliers, puis en extérieur. Un partie des éléments passe par un atelier de formage pour les formes courbes.
Les différentes parties découpées seront assemblées par panneaux sur des aires extérieures, quelques alvéoles ouvertes permettant toutefois un travail à l'abri des intempéries.
Les panneaux sont réalisés à l'envers et « pré armés », de façon à simplifier le travail d'armement final après assemblage. Plusieurs panneaux seront ensuite assemblés en bloc, un petit immeuble, qui doit respecter le tirant d'air (72m) et la charge utile du portique. Ce dernier le Très Haut Portique (THP) installé en 2022 à une capacité de 1400 t (1200 t de charge).
Avant de passer à l'assemblage dans la forme, une étape cruciale est nécessaire, disposer la ligne de tins, cales de bétons superposé d'une cale de bois qui doit être conforme à la géométrie, masse du fond du navire. Ce sont des géomètres experts spécialisés qui ont la charge de cette tâche essentielle.
Progressivement les blocs seront assemblés par des armées de soudeurs, parfois équipés de robots de soudage. Selon la taille du navire celui ci est assemblé pour partie dans la forme haute pour ensuite être déplacée en forme basse, ou directement assemblé en forme basse. Le déplacement est effectué en étanchant temporairement la partie réalisée, par flottaison après remplissage de la forme.
Lorsque l'assemblage est fait, l'essentiel de la peinture est réalisé, le navire étant ensuite transféré en bassin d'armement pour achever sa construction. Deux formes sont disponibles, la forme C la plus large et la forme Joubert.
La phase armement, dernière étape, consiste à terminer le montage ou l'assemblage des parties pré-montées, techniques, cabines, lieux de restauration, divertissements, ascenseurs...
Avant l'achèvement des essais partiels sont réalisés, puis les essais complets de chaque sous ensemble technique. La phase finale étant les essais en mer qui valident la réalisation, dans les 2 derniers mois avant livraison. A ce stade une partie du personnel d’exploitation du navire est présent pour se familiariser afin d'être rapidement opérationnel.
Deux cérémonies ont lieu avant le début d'exploitation. Celle du changement de pavillon, le pavillon du pays d'immatriculation et de l'armateur remplaçant le drapeau français et celui des Chantiers de l'Atlantique. La seconde, grande tradition, étant le baptême du navire.
Le départ d'un navire attire toujours un grand nombre de spectateurs objet de fierté pour la ville et la région.
Pierre SAURY (à droite de la photo).
Sources :
Site de Renversante :
https://www.saint-nazaire-tourisme.com/les-visites/les-visites-industrielles/chantiers-navals/
Documents :
Livre ; Les chantiers navals de Saint-Nazaire – Le goût des défis – Eric Lescaudron et Florence Le ROUX- édition La Geste - ISBN 979-10-353-0384-6
https://www.saintnazaire.fr/fileadmin/images/VAH-TOME_2_PANORAMA_DES_PATRIMOINES.pdf
https://www.nantes.port.fr/fr/nantes-saint-nazaire-port/lhistoire-du-port
https://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_des_navires_construits_aux_Chantiers_de_l%27Atlantique
https://www.20minutes.fr/economie/4061429-20231109-chantiers-saint-nazaire-bateaux-croisiere-fabriquent-rythme-effrene
https://chantiers-atlantique.com/references/solid-sail-aeoldrive/
https://beyond-the-sea.com/
Le musée Escal’Atlantique, unique en Europe, situé dans les fortifications de la base navale, était la seconde visite ; nous avons pu découvrir l’intérieur des paquebots transatlantiques de la seconde moitié du XIXème siècle au milieu du XXème. Ces navires étaient destinés au transport de voyageurs dont de nombreux immigrés, de courriers et de marchandises sur des lignes régulières (à distinguer des bateaux de croisières) en direction de l’Amérique Centrale (Mexique, Panama, Les Antilles…), chaque grand port ayant ses propres destinations. Les départs vers l’Amérique du Nord se faisaient du port du Havre, de Marseille vers les pays méditerranéens entre autres, de Bordeaux pour le Brésil etc… Ces lignes régulières répondaient aux grandes migrations de la fin du XIX et début XX èmes siècles des populations européennes au gré des événements.
Parmi les nombreux paquebots, les plus célèbres étaient le France, le Normandie, Ile de France,Princesse Eugénie, Liberté, Provence …
Si la propulsion se faisait à l’aide du charbon dans un premier temps, ce dernier est abandonné pour le fioul dans les années 30, plus facile et plus léger à transporter. Au fil du temps, ces navires furent de plus en plus luxueux, confortables et rapides. Une course frénétique s’est engagée pour la réduction du temps de voyage avec l’apparition et le développement de l’aviation. La navigation ne pouvant rivaliser, les armateurs ont misé sur le confort et le luxe à la française. Ainsi, la CGT(Compagnie Générale Transatlantique) a accordé une place d’honneur aux vins servis à bord (environ 75000 litres) participant à la renommée internationale de la flotte française.
Les visiteurs ont déambulé dans le musée comme dans un paquebot, découvrant bar, cabines, salle de restauration, salle des machines, ponts sur lesquels les voyageurs se reposaient, se promenaient ou jouaient, salons et timonerie. Cette dernière était un espace calme propice à la concentration à côté de laquelle se trouvait la cabine du commandant prompt à agir en cas de problèmes. Celui-ci était un véritable représentant de la compagnie auprès des passagers.
Les voyageurs pénétraient dans le bateau par le hall d’accueil décoré et spacieux (il constituait la première impression du voyage à venir) avant de parcourir le labyrinthe de couloirs et de gagner leur cabine. Les décors en bois des premiers paquebots seront délaissés pour des décors en laque ou en verre (afin d’éviter les incendies possibles).
Dès le XIXème siècle, une variété de petits salons complétaient les grands : fumoir pour les messieurs, salon pour les dames, salons de danse, de musique, de jeux, de correspondance, de lecture. Ils permettaient de se rencontrer et de se divertir pour atténuer ou faire oublier les angoisses du voyage.
Un journal était édité à bord chaque jour dans lequel les voyageurs pouvaient s’informer des activités organisées par le commissaire de bord ainsi que des menus, de la fréquence du changement d’heure et toutes les informations utiles.
Une autre partie du bateau était réservée aux voyageurs moins fortunés, les migrants. Regroupés dans des espaces plus étroits, ils dormaient dans des cabines dortoirs.
Les conditions sanitaires étant à peine acceptables, il n’était pas rare que des maladies contagieuses se propagent durant le voyage.
Murièle
L’Ecomusée a constitué la troisième et dernière visite de cette journée bien remplie. Ce musée est une sorte de rendez-vous avec l'histoire.
Saint Nazaire a connu un développement fulgurant autour de son port. Les collections de l’écomusée, maquettes, objets, films et photos d’archives vous font voyager dans l’histoire étonnante de cette ville construite deux fois en un siècle.
L’histoire de Saint-Nazaire est faite de moments heureux, la conquête de la mer et du ciel, la recherche du progrès social, mais aussi d’heures sombres, comme la Seconde Guerre mondiale. L’exposition permanente vous fait voyager à travers cette histoire, de la création du port et de la cité au 19e siècle à la reconstruction de la ville dans les années 1950…
Gérard
A peine cette journée passée, nous réfléchissons déjà à la sortie de l’hiver prochain et espérons qu’elle satisfera toujours autant les participants dans un moment de chaleureuse convivialité.